Interview

Après "Alice Nevers", Marine Delterme "recommence à zéro" à Hollywood avec l’aide de Robert Downey Jr

Publié le 7 mai 2024 à 17h46

Source : TF1 Info

Marine Delterme retrouve les écrans après deux ans d’une pause bien méritée qui l’a vue s’installer à Los Angeles avec son mari oscarisé Florian Zeller.
La comédienne incarne l’épouse de Robert Downey Jr dans un épisode de la série HBO "The Sympathizer", disponible sur Prime Video via le Pass Warner.
Une rencontre déterminante pour la quinquagénaire qui a signé, grâce à lui, dans l’une des agences de talent les plus puissantes des États-Unis.

Elle a quitté Paris en même temps qu'elle a dit adieu à celle qui a changé sa vie. Il y a deux ans, Marine Delterme refermait le chapitre Alice Nevers après deux décennies d'enquêtes menées sur TF1. L'actrice française s'est envolée pour Los Angeles où la carrière de son mari Florian Zeller s'est déployée après que son film The Father a décroché deux Oscars

Peu après leur installation en Californie, elle postule pour une série dans laquelle joue son comédien préféré. Robert Downey Jr incarne quatre personnages dans The Sympathizer, adaptation du roman de Viet Thanh Nguyen, sorti en 2015 et récompensé du prix Pulitzer. L'histoire d'un espion communiste franco-vietnamien forcé de reprendre du service à la fin de la guerre du Vietnam alors qu'il est exilé aux États-Unis. De passage à Paris, Marine Delterme a décroché son téléphone pour nous raconter les coulisses de cette collaboration. 

Robert Downey Jr et David Duchovny, c'est le feu et la terre
Marine Delterme

Votre première apparition dans The Sympathizer se fait lors d’une fête avec Robert Downey Jr et David Duchovny. On ne fait pas mieux comme accueil pour débuter à Hollywood…

Oui, c’était merveilleux. Ce sont de grands acteurs, absolument élégants et généreux avec leurs partenaires. C’était vraiment doublement agréable de collaborer avec eux, ils sont très différents.

C’est-à-dire ?

Robert Downey Jr est complètement étrange et organique. C’est vraiment un danseur en mouvement avec une énergie folle. Il a gardé un peu de Chaplin en lui. Il est énigmatique, imprévisible. C’est une sorte de panthère. Il est extraordinaire de toute façon, on connaît tous un peu son histoire. Entre notre tournage et l’avant-première à Los Angeles le mois dernier, il a gagné un Oscar (pour Oppenheimer, ndlr). David Duchovny est un acteur très intellectuel. Il vient d’Harvard, son père était un grand écrivain. Il écrit lui-même des livres. Il m’a dit qu’il avait été reçu chez Bernard Pivot à Paris. Il est très calme. C’est le feu et la terre.

Comment vous décririez la série The Sympathizer ?

C’est l’histoire d’un jeune homme qui n’a jamais été à sa place et qui s’est retrouvé toute sa vie en porte-à-faux à être agent double, voire triple. Il ne sait pas qui il est. À travers ce personnage joué par Hoa Xuande, on raconte la complexité de la guerre du Vietnam. On la voit enfin du côté des Vietnamiens. L’épisode dans lequel j’apparais est celui qui raconte le plus cette guerre de la mémoire. L’espion se retrouve à Los Angeles au milieu des années 1970 sur le tournage du film d’un réalisateur oscarisé qui va faire son Apocalypse Now. Il va essayer par tous les moyens de contrôler que ce que dit ce cinéaste soit juste et vrai. Comme c’est une satire, ça part dans la comédie.

Monique Thibault, votre personnage, est la décoratrice de ce film qui partage la vie du réalisateur incarné par Robert Downey Jr...

C’est un très beau rôle face à Robert Downey Jr. Il est quasi enfantin, elle est la seule qui lui tienne tête. Elle est sa muse. Elle est très forte et a beaucoup d’humour. On a des scènes de conflit mais aussi des scènes d’intimité. On forme un vrai couple avec de la sensualité et de l’humour. C’était assez étonnant de me retrouver avec lui qui est, pour moi, l’acteur puissant du cinéma américain. 

Comment s’est déroulée la collaboration avec lui ? 

Je ne l’avais pas vu beaucoup dans le romantisme. C’est un acteur à part, même dans les Marvel il a imprimé son style. Je m’étais dit : "Comment je vais connecter avec lui s’il est comme dans ses films ?" Et en fait, il est merveilleusement accessible. On s’est tout de suite entendu, avec une alchimie vraiment forte.

Dans la série, Robert Downey Jr dit que vous l’appelez, en français dans le texte, "mon petit chou". Dans la vie, il ne serait pas plutôt votre nouvel ange gardien ?

Oui, c’est mon ange gardien. Un jour, ils m’ont appelée pour une scène en plus qui n’était pas prévue. C’est très rare. Il m’a vue arriver au maquillage depuis mon atelier sculpture, avec ma combinaison pleine de plâtre. Je lui ai dit en plaisantant : "Si j’avais un agent, il m’aurait protégée". Il s’est étonné que je n’en ai pas. Il m’a dit qu’il allait me présenter les siens, il l’a fait et j’ai signé chez eux. Il m’a offert un passeport pour Hollywood. C’est un immense cadeau, c’est quasi impossible de rentrer chez des agents de ce niveau-là pour une actrice française.

J’ai un projet de long-métrage et aussi une série aux États-Unis
Marine Delterme

Guillaume Gallienne, qui lui aussi a tourné dans une série HBO, The Regime, nous disait "Je débarque comme un débutant mais j’ai 30 ans de métier". Vous avez vécu la même chose ?

Exactement. On en a parlé avec Guillaume récemment. On recommence à zéro. Le premier jour, j’étais sur ma petite chaise. Je ne connaissais personne. David Duchovny est venu se présenter parce qu’il ne savait pas qui j’étais. Robert Downey Jr m’a demandé si j’aimais improviser. Il se trouve que j’adore ça, je l’ai fait pendant 20 ans sur Alice Nevers. Je suis reconnaissante d’avoir eu autant de métier derrière moi pour pouvoir vraiment profiter de cette collaboration avec lui sans avoir peur.

Le personnage de Guillaume Gallienne n’était pas français non plus dans le scénario. La production a changé la nationalité de votre personnage, qui était italienne et s’appelait Monica, après avoir reçu votre vidéo d’audition. Qu’avez-vous fait dans cette fameuse tape pour les bousculer autant ?

J’ai vu beaucoup de tapes avec mon mari qui est metteur en scène (Florian Zeller, ndlr) quand il cherchait son acteur principal pour The Son. Énormément d’acteurs faisaient la même scène, ça ronronnait. Je savais qu’il fallait que quelque chose se passe. J’ai enregistré ma vidéo avec un excellent acteur anglais qui m’a dit : "Dis-toi que tu n'as pas ce rôle et amusons-nous !" Alors j’ai changé tout le texte et j’ai improvisé !

undefinedundefinedEmma McIntyre / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Pour The Sympathizer, vous avez travaillé avec le Coréen Park Chan-Wook et le Brésilien Fernando Meirelles. Avec quels autres cinéastes rêvez-vous de collaborer ? 

Il y en a tellement ! Jonathan Glazer, qui a réalisé La Zone d’intérêt, mais aussi Christopher Nolan, Yorgos Lanthimos (Pauvres créatures) et Ruben Ostlund (doublement récompensé de la Palme d’or, ndlr).

Depuis la fin de la grève à Hollywood, avez-vous eu d’autres opportunités outre-Atlantique ?

Oui j’ai un projet de long-métrage là-bas et aussi une série. J’attends de voir les dates. Les choses se sont décantées il y a peu parce que ça reprend très doucement. Je rentre en France en juillet avec ma famille donc je vais faire comme mon mari, des allers-retours. On va vivre entre deux continents. Mais c’est très bien, la France me manque beaucoup.

Elle penserait quoi la jeune Marine, qui à 18 ans travaillait comme mannequin aux États-Unis, de celle qui à 54 ans se lance ce nouveau défi à Hollywood ?

Je m’étais déjà lancé un défi en partant à New York à 18 ans. J’avais déjà accompli mon rêve américain de travailler avec les plus grands photographes américains. Je l’avais un peu laissé dans un coin de ma tête mais j’y repensais en me disant que c’était quand même une merveilleuse période. Revivre cette énergie-là à plus de 50 ans, c’est assez magique. Il ne faut pas lâcher ses rêves. C’était exigeant de partir au bout du monde, de quitter mes amis, ma famille et mon fils aîné. Quand j’étais plus jeune, mes parents ne voyageaint jamais. À 17 ans, je n’avais jamais quitté la France. Le mannequinat a été une ouverture sur le monde pour moi. Grâce à son aventure avec The Father, mon mari m’a rouvert cette porte. Je n’aurais pas pu le faire seule. Vivre plus grand que soi, c’est un beau cadeau qu’il m’a fait.

Alice Nevers aurait-elle démasqué l’espion de la série The Sympathizer ?

J’en suis sûre (rires) !

La série Section de recherches a eu droit à de nouvelles intrigues sous forme d’unitaires. C’est un format qu’on pourrait imaginer pour Alice Nevers ?

C’est un format auquel on peut réfléchir avec Jean-Michel Tinivelli, la production et TF1. Si on faisait ça, et ce n’est pas exclu, il faudrait vraiment qu’on se réinvente. C’est aussi pour ça que la série a duré autant. On l’a déjà fait une fois au bout de dix ans en passant aux épisodes de 52 minutes et en changeant le casting. Si là on me proposait quelque chose, il faudrait étonner les spectateurs et rebondir dans le ton d’aujourd’hui parce que le monde a changé. Si on trouve, pourquoi pas. Sinon, ce n’est pas la peine de décevoir le public.

Alice Nevers enquête à Hollywood, ça aurait de la gueule non ?

Oui, c’est pas mal ! Je n’y avais pas pensé (rires).

>> The Sympathizer - en US+24 sur Prime Video via le Pass Warner


Delphine DE FREITAS

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