Dos d'âne illégaux : les nouveaux ralentisseurs devront respecter strictement les normes, tranche la justice

par Maxence GEVIN | Reportage TF1 Henri Dreyfus, Elise Regaud, Flora Monbec
Publié le 6 mai 2024 à 17h45

Source : JT 13h Semaine

La France est passée maître dans l'art de construire des dos d'âne aussi nombreux que variés.
Et beaucoup d'entre eux ne respectent pas les normes en vigueur.
Une récente décision de la Cour administrative d'appel de Marseille pourrait mettre fin à ce phénomène.

Une décision qui devrait satisfaire de nombreux automobilistes. Après un premier passage en appel, puis devant le Conseil d'État, la Cour administrative d'appel de Marseille a caractérisé certains ralentisseurs routiers de non réglementaires. Concrètement, la quatrième chambre de l'instance estime, dans son arrêt du 30 avril dernier*, que tous les obstacles de ce type sont tenus de suivre les dispositions du décret de 1994, lequel énonce certaines normes strictes. Cette position est particulièrement lourde de conséquences en ce qui concerne les "coussins berlinois" et "plateaux traversants", jusqu'ici exclus du dispositif, et pourrait faire jurisprudence. 

Dans le détail, la Cour marseillaise juge que les "dispositions du décret du 27 mai 1994 et ses annexes, qui n’excluent pas de leur champ d’application les ralentisseurs routiers de type coussins berlinois et plateaux traversants, fixent des règles d’implantation et de signalisation qui s’appliquent à l’ensemble des ralentisseurs de vitesse de type dos d’âne ou de type trapézoïdal". "Il suit de là qu’en l’état actuel des dispositions réglementaires en vigueur, tous les ralentisseurs de type dos d'âne ou de type trapézoïdal sont soumis aux règles d’implantation et de signalisation fixées par le décret du 27 mai 1994 et que ces règles sont les seules dispositions d’application obligatoire à l’égard des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics qui réalisent ou aménagent ces ouvrages", ajoute-t-elle. 

Pas d'obligation de détruire les ralentisseurs non conformes

Dans les faits, la juridiction fait appliquer ces règles pour tous les futurs ralentisseurs. Autrement dit, la validation de chaque nouveau chantier en la matière pourrait désormais être assujettie à l'application du cadre posé par le décret de 1994. 

En revanche, la justice refuse d'ordonner la destruction des ouvrages déjà construits et qui ne respectent pas ces mêmes règles. Elle rejette même les arguments environnementaux apportés par les plaignants, selon qui un dos d'âne mal réalisé engendre un surplus de pollution pour les véhicules qui le retrouvent sur leur trajet (en raison du ralentissement forcé suivi d'une accélération importante). "Les intéressés n’établissent pas, par leurs allégations très générales, que ces ouvrages présenteraient des inconvénients tenant à des nuisances sonores, des dégradations de confort à bord, ainsi qu’à une augmentation de la pollution des émissions de CO2 et à l’émission d’un nombre considérable de particules fines", détaille ainsi le texte. 

Il faut casser la vitesse, c'est une certitude, mais il faut le faire de manière correcte
Jean-Christian Meslet

Pour rappel, la France est particulièrement friande des dos d'âne et en compte plus de 450.000 sur son territoire. Or, selon plusieurs associations, les trois quarts d'entre eux présentent des irrégularités. "Il faut casser la vitesse, c'est une certitude, mais il faut le faire de manière correcte. Il existe des dispositifs très, très brutaux", pointe Jean-Christian Meslet, directeur de l'Automobile club du Midi, dans le reportage de TF1 à retrouver en tête de cet article. "Nous avons énormément de cyclistes et de motards qui viennent dans notre association à la suite de chutes très graves, avec des handicaps très lourds", abonde Thierry Modolo, porte-parole de l'association Pour une mobilité sereine et durable. 

Le décret du 27 mai 1994 énonce plusieurs normes très précises : les ralentisseurs doivent mesurer dix centimètres de hauteur et quatre mètres de long maximum, être clairement signalés, être installés dans des zones à 30 ou 50 km/h ou encore ne pas se situer en dehors des agglomérations. Par ailleurs, ils sont interdits sur certaines pentes, ainsi que sur les voies où le trafic excède 3 000 véhicules par jour. S'il faudra encore attendre avant de voir certains obstacles non conformes être détruits, cette récente décision pourrait inciter les futurs constructeurs à les élaborer en tenant bien plus compte de ces obligations. 

*Le texte n'est pas encore consultable sur Légifrance. 


Maxence GEVIN | Reportage TF1 Henri Dreyfus, Elise Regaud, Flora Monbec

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